vendredi 5 octobre 2007

Mouloud Mammeri

Mouloud Mammeri 1917 - 1989

Il impressionnait par l'étendue des champs culturels et linguistiques où il déployait son activité où il déployait son activité. Parlant grec, latin, arable, français et amazigh, Mammeri est au carrefour de plusieurs disciplines dans son œuvre romanesque ne rend pas entièrement compte. Il exerça une activité d'ethnologue, de linguiste, de poète et de traducteur, dans le souci constant de défendre la culture berbère. Sa relation au savoir occidental est nuancée. Si d'un côté il l'a utilisé comme une arme, comme un tremplin vers des savoirs autres, il exerça à son encontre une critique extrêmement pertinente sur le plan intellectuel : le regard de l'Occidental sur notre société, dans notre simplisme, son aveuglement, sa lourdeur montre qu'il est lui-même un sujet qui a perdu la notion dynamique de l'histoire et de sa propre évolution. Lequel regard de myope s'est empressé d'apposer à son œuvre la prévisible étiquette de folkloriste.
A la lecture des romans, devant une langue assez puissante, qui sert des enjeux bien plus larges que la simple description d'une société ancestrale entraînée contre son gré dans une marche forcée vers un hypothétique progrès qui devaient aussi saisir l'athénien devant Œdipe roi. Tout y est conflit. Le couple, l'amour, semblent un refuge dans l'innocence des jeux de jeunesse. Mais pour peu qu'on le baigne dans le groupe, il n'est plus que le nombril du malheur. Pourtant, hors du groupe, point de salut (La colline oubliée) pour le héros parti chercher fortune du côté du colon et de ses villes. Celui qui s'en retourne est un être brisé qu'une longue convalescence dans le bain tribal n'arrive pas à rendre complètement aux siens : le village se pare des couleurs ternes d'un passé désacralisé. En Kabylie, en Creuse, au Nevada, quoi de plus universel ?
Une autre dimension du monde romanesque de Mammeri aurait à voir avec le fantastique. Acculés à une impasse, les personnages ont souvent recours à des forces telluriques, ancestrales, pour résoudre les désordres provoqués par l'emballement du temps ou conjurer quelque malédiction envoyée par un ancêtre Père Fouettard. Le dernier roman La traversée, voit le héros, déçu par le tour qu'à pris l'Algérie indépendante, entreprendre un traversée du Sahara par laquelle il espère bien trouver la mort. Il ne rencontre qu'un désert vide de sens, d'où tout espoir s'est retiré : qu'on est loin de la célébration du pré carré !

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